Méthodes de lecture : dissiper l’aveuglement idéologique
L’idéologie, c’est connu, défie souvent le bon sens, autant qu’elle dénie le réel. A cet égard, les politiques scolaires constituent depuis une bonne trentaine d’années un cas d’école, et le ministère de l’Education nationale, un temple de l’obscurantisme idéologique. Nous n’avons eu de cesse de le dire, et le répétons à l’occasion de cette journée de mobilisation que nous soutenons : la catastrophique réforme Valls-Vallaud-Belkacem se présente précisément comme l’ultime avatar de cet obscurantisme ayant mené notre système d’instruction au désastre.
C’est autant le cas, et depuis bien longtemps, des méthodes d’enseignement de la lecture qui, à partir de la fin des années 60, ont produit des générations de dyslexiques et d’illettrés, sans qu’aucun ministre, à l’exception peut-être de Gilles de Robien, dont les directives resteront finalement lettre morte, ne s’émeuve vraiment de la situation, diligente un audit permettant d’en prendre la mesure, ni esquisse la volonté politique d’y remédier. Pourtant l’ensemble des méthodes d’apprentissage de la lecture, autres que celle, traditionnelle, du déchiffrement partant de la lettre et de la syllabe pour parvenir au mot et à la phrase constituent une aberration — aberration autant linguistique que neurologique —, sans compter que, ne permettant pas aux enfants qui, de par leur origine sociologique, ont tout à attendre de l’Ecole, d’accéder à la compréhension de la langue écrite, elles accroissent les inégalités sociales.
Félicitons-nous, dans ce contexte, de la publication d’une enquête récente, judicieusement intitulée « Réapprendre à lire ». Les deux auteurs, Sandrine Garcia et Anne-Claudine Oller, y énoncent et étayent ce que dicte le simple bon sens. Elles joignent ce faisant leur voix à celle de nombreux spécialistes de différentes disciplines, et justifient ce que le Collectif Racine n’a de cesse de prôner : la mise hors-la-loi de toute autre méthode que la syllabique ! Gageons toutefois que l’écho, s’il en est un, que rencontrera ce travail auprès de ceux qui président pour l’heure aux destinées de l’Ecole de la République ne dissipera pas l’obscurantisme idéologique dans lequel ils se tiennent. De sorte que l’enseignement de la lecture ne renouera avec le bon sens et, au-delà, l’Ecole avec ses missions qu’à la seule faveur du changement politique que nous préparons.