Nouveaux programmes Vallaud-Belkacem : l’art de l’antiphrase
Najat Vallaud-Belkacem aurait-elle à ce point entendu le Collectif Racine, mesuré l’écho qu’il reçoit auprès d’une large partie de la population consciente des dérives de son Ecole et des mesures, de simple bon sens souvent, qu’il conviendrait de mettre en œuvre afin de la redresser ? Le ministre aurait-il subitement vu la lumière ? La voilà en tout cas, à l’occasion de la présentation des nouveaux programmes scolaires du CP à la 3e, préconisant un enseignement allant du simple au complexe, prônant les vertus d’ «une dictée, du calcul et de la lecture tous les jours», et proclamant le «retour aux fondamentaux».
Mais ne soyons pas dupes : le ministre Vallaud-Belkacem ne se dispose certes pas à appliquer une partie du programme qu’au Collectif Racine nous avons entrepris d’élaborer en vue de la prochaine Présidentielle ! Madame le ministre est en effet si bien pétrie de cette idéologie battant en brèche les fondamentaux de l’Ecole républicaine — une Ecole transmettant avec exigence le savoir dans le bien individuel des enfants et dans celui, collectif, de la nation, reconnaissant les talents et mérites de ceux-là pour assurer l’avenir de celle-ci— qu’elle a provoqué, par sa rigidité constamment manifestée, la démission de plusieurs membres du Conseil Supérieur des Programmes (CSP), organe prétendument indépendant, mais placé dans les faits sous sa tutelle, dont elle présente aujourd’hui les travaux.
Simplement Madame le ministre a compris que, de sorte à ce que ces nouveaux programmes, accompagnant d’ailleurs pour partie sa réforme du collège, soient appliqués sans heurts, il lui fallait donner des gages à cette part conséquente des professionnels et usagers de l’Ecole qui attendent qu’elle renoue avec le bon sens et se recentre sur ses missions essentielles. Mais qu’en est-il — sur le fond — de ce prétendu «retour aux fondamentaux», quand on sait l’amputation sans précédent des horaires précisément alloués aux disciplines fondamentales ? Quelle justification à la «dictée quotidienne», quand on sait que grammaire et conjugaison ne sont pratiquement plus enseignées ? Comment croire à l’ambition de ces nouveaux programmes, quand est maintenu le principe du « socle commun des connaissances et compétences » ? Le « retour aux fondamentaux » proclamé par le ministre sonne donc comme une antiphrase, et ne relève à la vérité que d’une nouvelle stratégie d’enfumage qui n’abusera personne.