Quand les bobos parlent de l’Ecole aux bobos, cela donne quelque chose comme « Entre les murs » (palme d’or au festival de Cannes 2008 : il y a cohérence). Nous tenons là l’exact contre-modèle de ce que doivent être les rapports d’un enseignant au savoir et aux élèves qui lui sont confiés.
Il y a d’abord une sombre réalité : dans beaucoup d’établissements, dans beaucoup de classes, la transmission du savoir est largement entravée, voire rendue impossible par la conduite des publics scolaires. Aux causes extérieures à l’Ecole, telle les évolutions démographiques, la montée des communautarismes, l’inversion des valeurs légitimes, du fait de la glorification de l’argent et des « stars », icônes décadentes d’une civilisation en péril, le système a ajouté ses propres responsabilités, principalement en prétendant s’adapter aux « élèves réels » et en frappant de suspicion l’autorité, au point de répugner à l’exercer. Voilà ce que ce film-documentaire cristallise, en escomptant de surcroît susciter la commisération du spectateur, instamment invité à puiser dans ses réserves de bons-sentiments.
A rebours de ce qu’entend montrer « Entre les murs », la culture scolaire est précisément celle qui doit élever et édifier ― elle ne saurait se confondre avec celle de la rue, du foot’ ou des médias ―, et le fait qu’il incarne cette culture noble est ce qui fonde l’autorité de l’enseignant : beaucoup de professeurs qui composent avec le chahut gagneraient à s’aviser que le savoir qu’ils possèdent rend leur légitimité indiscutable. Par ailleurs, face à ce qu’un usage pudique désigne comme des « incivilités », il est impératif de réaffirmer les règles nécessaires à toute vie en commun, car il n’y a pas de droits qui ne s’accompagnent aussi de devoirs, et toute transgression des règles doit être suivie de sanctions effectives. (AA)
On lira par ailleurs la réaction de J.-P. Brighelli.