par Julien Langard
professeur certifié d’Histoire-Géographie
Collectif Racine – Vaucluse
Plus un mensonge est gros, plus il passe…. Cet adage illustre à merveille la manière dont ont été présentés par le CSP (Conseil Supérieur des Programmes) les projets de nouveaux programmes d’histoire au collège.
En effet, le préambule des nouveaux programmes dévoilés le 13 avril dernier précise que ce projet ne fait pas «disparaître le cadre national, ni la perspective chronologique propre à l’histoire» et que «dans un ordre chronologique, le programme permet de mieux lire et comprendre le monde d’aujourd’hui en insistant sur des moments forts, des traits marquants des sociétés du passé et des problématiques indispensables à la formation du citoyen.»
Il s’agit là d’un mensonge grossier, d’un véritable déni de la réalité.
Déjà supprimée au lycée (rappelons pour mémoire que les élèves de 1ères étudient aujourd’hui la Seconde Guerre mondiale avant même d’avoir étudié le totalitarisme nazi et soviétique…), l’histoire chronologique parvenait jusqu’à présent à survivre tant bien que mal au collège. Ce temps est révolu. Ainsi en 5ème, le programme se divise non pas en période chronologique comme, par exemple: les Mérovingiens / les Carolingiens / les Capétiens mais par thèmes : la Méditerranée un monde d’échange / Sociétés, Eglise et pouvoir politique dans l’occident chrétien / Nouveaux mondes, nouvelles idées.
Mais ce n’est pas tout. Le CSP a décrété qu’environ les 2/3 de l’Histoire de France seront désormais traités selon « le libre choix des professeurs » en créant une distinction arbitraire entre des thèmes obligatoires et des thèmes facultatifs. Par exemple, en classe de 5ème, l’étude de l’Islam devient obligatoire mais l’Occident chrétien au Moyen âge, l’empire Carolingien ou l’empire Byzantin deviennent facultatifs de même que l’Humanisme, la Réforme protestante et les Guerres de religion….
En classe de 4ème la traite négrière est obligatoire mais l’étude de la société du XVIIIème siècle, les Lumières et la Révolution américaine deviennent facultatifs. L’histoire politique du XIXème s’interrompt quant à elle à la fin du Ier Empire en1815 pour reprendre sous la IIIème République ; exit la Restauration, la Monarchie de Juillet et le Second Empire…..
Enfin, en classe de 3ème, la Seconde Guerre mondiale n’est principalement étudiée que sous le prisme du génocide des Juifs et des Tsiganes, des déportations et de l’univers concentrationnaire. Pearl Harbor, Stalingrad et le débarquement de Normandie vont donc rejoindre le catalogue des grandes batailles dont vos enfants n’entendront jamais parler aux côtés de Marathon, Salamine, Actium, les champs Catalauniques, Poitiers, Bouvines, Azincourt, Marignan, Lépante, Fontenoy, Valmy, Trafalgar, Camerone, la Marne etc…
Ces nouveaux programmes finissent donc de dynamiter les vestiges d’une histoire nationale déjà en partie ruinée par trente années de pédagogisme démagogique. D’un collège à l’autre, les élèves apprendront une Histoire de France différente selon les choix programmatiques du professeur et le socle commun sera largement dominé par une histoire « venue d’ailleurs », marquée par le culte perpétuel de l’excuse et de la repentance.
Alors que l’Histoire fut au XIXème siècle la pierre angulaire de l’élaboration de notre « roman national », elle est aujourd’hui utilisée comme une véritable arme de sabotage pour spolier les jeunes générations de leur identité et de leur droit le plus légitime au « sentiment d’appartenir à une Nation ».