Lettre ouverte à Natacha Polony et à Jean-Paul Brighelli

Lettre ouverte à Natacha Polony et à Jean-Paul Brighelli

Madame Polony,

Vous nous consacriez, dans les quelques jours qui suivirent notre conférence nationale de lancement, une chronique vidéo sur le site du Figaro, chronique dont vous reprenez le texte, en version longue, dans votre livre récemment paru : « Ce pays qu’on abat ». Vous y signalez les orientations de notre projet pour l’Ecole, dont vous ne manquez pas de reconnaître le bien fondé, attachée comme vous l’êtes à la République et à ce que son système d’enseignement n’aurait jamais dû cesser d’être. Mais, prenant acte de la rupture programmatique que, rapportées à l’histoire du mouvement politique auquel nous sommes liés, elles vous paraissent constituer, vous achevez en jetant sur notre engagement un soupçon d’ « opportunisme »…

Monsieur Brighelli,

Après avoir, vous aussi et logiquement, tant elles rejoignent celles qui sont les vôtres depuis longtemps, reconnu que vous souscriviez pour l’essentiel à nos analyses et positions, vous confiez, dans votre « Tableau noir » daté du 4 juin et publié sur le site du Point, cette « envie » qui, sur fond de « désespoir », vous prendrait parfois de vous tourner vers le « diable » si celui-ci « [vous permettait] de sauver l’Ecole ». Mais, dans cet autre billet du 13 juillet que vous consacrez au livre de Natacha Polony, où vous vous attachez au passage à rassurer quant à votre supposée conversion au « diable », vous croyez devoir suspecter à votre tour la « sincérité » qui nous anime…

M’adressant ici à vous deux, dont les écrits respectifs se font écho, et dont je sais l’amour profond que nous avons en commun pour l’Ecole de la République, à vous deux donc, qui avez parcouru une part du chemin qui nous sépare encore, je vous appellerai d’abord à laisser à ceux qui ne possèdent ni votre clairvoyance politique, ni votre conscience du déclin que connaît notre système scolaire, semblables procès en intégrité et autres facilités démonologiques.

D’abord, le prétendu « opportunisme » de ceux, et j’en fus l’un des premiers, qui choisirent d’assumer pleinement, à visage découvert, cet engagement politique, à la fois pour l’Ecole et pour la France, n’a pas manqué, vous l’imaginerez sans peine, de les exposer à bien des tentatives d’intimidation, révélant au passage le terrorisme idéologique régnant dans un milieu professionnel où devrait prévaloir pourtant la plus absolue neutralité. Prenant la mesure des risques et assumant de nous y exposer, ce qui requerrait, vous en conviendrez, un certain courage, c’est la force de nos convictions qui a guidé notre démarche. Cela devrait suffire à convaincre du désintéressement qui lui est inhérent.

Si vous nous concèderez, je le pense, au moins ce courage individuel, vous pourriez persister toutefois à nous tenir pour l’instrument d’intérêts partisans. De sorte à déjouer cette autre suspicion, je reviendrai sur un certain nombre de points : le Collectif Racine est une composante à part entière du Rassemblement Bleu Marine ; s’il se trouve que nombre d’entre nous, et c’est notamment mon cas, appartenons aussi au Front National, de fait rassemblons-nous très au-delà ― du FN comme du RBM ! Que l’ensemble de nos membres acceptent cependant ces affiliations s’explique simplement par le fait que, ne se résolvant pas à faire le deuil de l’excellence passée qui fut celle notre Ecole républicaine, ils savent, et nous nous rejoindrons encore, que son déclin est imputable à plus de trente ans de politiques éducatives, de droite comme de gauche, et aux complicités syndicales dont elles ont bénéficié. Et ils le savent si bien qu’ils sont convaincus que le redressement de l’Ecole n’interviendra qu’à la faveur d’un véritable changement politique qui permettra le redressement national ! Ce pourquoi, bien qu’association professionnelle, l’engagement de notre collectif est intrinsèquement politique, et il l’est en conscience et de pleine adhésion.

Pourraient alors subsister comme ultime justification à la défiance que vous affichez, ces évolutions, voire bifurcations qu’ont connu, il est vrai, les positions sur l’Ecole portées par le mouvement auquel nous nous rattachons. Or, là où vous voudriez voir un retournement de pur « opportunisme », je vous inviterai simplement à considérer les évidences suivantes : les partis politiques évoluent, certains vers le pire, d’autres vers le meilleur ; beaucoup renient leurs positions et engagements passés ― le PS et ses affidés ont consciencieusement trahi les classes populaires et les idéaux qu’ils avaient historiquement portés, l’UMP a tout aussi résolument trahi ces principes d’indépendance et de souveraineté nationales qui correspondaient à une « certaine idée de la France »… ― ; d’autres au contraire les affirment, ce qui les conduit parfois à des synthèses inattendues. Et c’est, puissiez-vous en prendre acte, le cas du Front National, dont toute l’histoire démontre l’indéfectible attachement à la France et qui, dans le contexte contemporain où le péril vient de la mondialisation sauvage amplifiée par son vecteur européiste, est aujourd’hui le seul mouvement politique à la hauteur de cette « idée de la France », qui rassemble bien au delà de lui-même ― par-delà la gauche et la droite ― les Français, et qui se singularise par une fidélité sans faille aux principes de la République. De sorte que, oui, seuls le Rassemblement Bleu Marine et le Front National permettront cette refondation républicaine dont l’Ecole a tant besoin : ils sont les seuls à pouvoir sauver l’Ecole !

Madame Polony, Monsieur Brighelli, si j’ai jugé opportun, par le moyen de cette lettre ouverte, de m’adresser conjointement à vous, c’est que je sais pouvoir attendre de ces lignes s’adressant à votre raison autant qu’à vos sentiments pour l’Ecole, qu’elles vous aideront à parcourir le peu de chemin qui nous sépare encore.

Alain Avello
texte publié dans la Lettre du Collectif Racine n°1-août 2014

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2 commentaires on "Lettre ouverte à Natacha Polony et à Jean-Paul Brighelli"

  • Je n’ai même pas besoin d’adhérer au FN que l’on m’en croit déjà membre. Jugez plutôt :
    http://www.cahiers-pedagogiques.com/Imposture-et-surenchere-Brighelli-a-touche-le-Front
    ou
    http://blogs.mediapart.fr/edition/aggiornamento-histoire-geo/article/100614/le-cretin-sa-fabrique-et-ses-racines
    entre autres…
    Je me bats pour l’Ecole depuis des années — bien avant que MLP entre en politique. Je me bats depuis le début des années 1980, en réalisant des anthologies de littérature à haute ambition alors même que la tendance était à la déflation des savoirs. Je me bats depuis la funeste loi Jospin, depuis uq’Alain Viala a défiguré le Bac de Français en 1999-2000, je me bats comme Polony pour que les plus humbles, et aussi les plus doués, et tous les élèves en fin de compte, aient le droit (aujourd’hui dénié par les belles consciences de gauche) d’aller au plus haut de leurs capacités. Je n’ai pas besoin d’adhérer à un parti ou un autre (surtout à un autre…). Quand l’un ou l’autre des partis de bonne foi (et j’exclus définitivement la Gauche socialiste de la liste) aura besoin de mes compétences, je serai là, comme je l’ai été pour d’autres. D’ici là, je n’ai pas à formuler d’allégeance à qui que ce soit : je suis un esprit libre, libre de dire la vérité, quoi qu’en pensent ceux qui me haïssent ou tentent de caricaturer mon action, parce qu’ils sont eux-mêmes en peine de propositions. Je n’oublie rien des injures, rien des coups de chapeau. Les uns me font plaisir, les autres m’indiffèrent. Je crois sincèrement que nous finirons par sauver l’école de la république, que des imbéciles ont admirablement flinguée depuis des lustres sous prétexte d’égaliser les chances — par le bas. Bien à vous…

  • Lepicure dit

    Très bien. Rien à ajouter. J’espère que N.POLONY et JP. BRIGHELLI pour lesquels j’ai aussi de l’estime se tiendront à distance des polémiques anti Marine.