Les professeurs de classes préparatoires dans le viseur du ministre

Les professeurs de classes préparatoires dans le viseur du ministre

par Jean Mikhailov

Dans le cadre de la modification des statuts des professeurs et du décret de 1950 qui les régit, nouveau chantier du ministre de l’Éducation Nationale, les obligations horaires des professeurs des classes préparatoires font, semble-t-il l’objet d’une « attention » toute particulière. Nous avons appris brutalement, par le seul article du Monde de mardi dernier, que ces obligations seraient revues à la hausse, passant pour tous à 10 heures minimum, alors que jusqu’à présent elles s’échelonnaient de 8 heures (classes de seconde année de 35 élèves et plus) à 10 ou 11 heures (pour les classes de seconde ou première année les moins chargées). Le prétexte fallacieux donné par le ministre est le suivant : les professeurs enseignant en ZEP exercent dans des conditions difficiles, devant des classes hétérogènes : ils méritent donc une décharge horaire supplémentaire, qui leur permettra d’accomplir un travail d’équipe en dehors de la classe. Mais cette mesure doit être financée à coût constant. Où donc trouver l’argent ? chez les professeurs de classes préparatoires, notoirement privilégiés, ayant la chance de s’adresser à un public homogène et favorisé. Cela signifie concrètement que les collègues devant 8 heures et en faisant jusqu’à maintenant 10 ou plus perdront leurs heures supplémentaires et travailleront autant pour gagner beaucoup moins, tandis que ceux qui en font 8 et en devront 10 se retrouveront en sous-service.

Une telle mesure est scandaleuse à plus d’un titre. La politique de ce ministère se résume en effet à déshabiller Pierre pour habiller Paul, et à tenter de monter une catégorie de professeurs contre une autre. Résoudra-t-on le problème des ZEP avec cette méthode ? On peut en douter. Par ailleurs, dans ce parallèle établi entre deux niveaux d’enseignement, aucune allusion n’est faite à la charge de travail à laquelle les professeurs de classes préparatoires sont soumis : pas un mot sur le contenu de leur enseignement, pas un mot sur leur haute qualification. Une présentation caricaturale, indigne, ne mentionne que leurs enviables conditions de travail et leur salaire, qui irait jusqu’à « 100000 € par an », contre-vérité absolue. La seule compensation financière à la très lourde tâche qu’impose la préparation aux concours est constituée par les heures supplémentaires et les colles, c’est-à-dire un travail effectivement accompli, et non des primes ! Or la majorité des professeurs de classes préparatoires se verra privée de toute heure supplémentaire, et lorsque celles-ci subsisteront, elles seront, tout comme les colles, payées à un taux unique, le plus bas. Outre le préjudice financier, qui, s’il concernait par exemple la SNCF, aurait pour effet de paralyser immédiatement la France entière, c’est le mépris affiché, l’humiliation infligée, qui révoltent les professeurs de classes préparatoires. Or, en attaquant ainsi une catégorie de professeurs qui incarne ce que notre Instruction publique conserve de meilleur, au sein du marasme de l’Éducation nationale, c’est la notion même d’élitisme républicain que ce gouvernement de gauche tente d’abattre. On trouve les « riches » qu’on peut, en organisant une parodique Nuit du 4 août…

Une rumeur circule selon laquelle, pour couper court à toute contestation, le très démocrate ministère Peillon a d’ores et déjà décidé de mettre au plus vite en œuvre ce projet, par un décret concernant spécifiquement les obligations horaires des professeurs de classes préparatoires, le 12 décembre prochain. Rien ne semble plus urgent… Une large mobilisation est prévue pour la semaine prochaine : non pour organiser « les conservatismes », selon la méprisante formule du ministre, mais pour clamer notre colère face à l’injustice.

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Le Collectif Racine soutient les professeurs de classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) :
lire les communiqués :

communiqué de presse du 25 nov. 2013 : le Collectif Racine soutient les professeurs des classes préparatoires aux grandes écoles !

communiqué de presse du 2 déc. 2013 : Réforme des statuts des professeurs : le Collectif Racine accuse le SNES de collusion !

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